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« Pour un contrat présidentiel de redressement »(JL Debré et JM Naualot)

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« Pour un contrat présidentiel de redressement »(JL Debré et JM Naualot)

Jean-Louis Debré, ancien président du Conseil constitutionnel, et Jean-Michel Naulot, ancien membre du collège de l’autorité des marchés financiers, livrent dans une tribune au JDD  leur diagnostic sur les finances publiques alors que la campagne présidentielle se prépare.

 

tribune :

« La campagne présidentielle qui se prépare se doit d’être un moment de vérité entre le futur président et le peuple français. À l’image du contrat de ­législature défendu par Pierre Mendès France, elle devrait engager le candidat sur un « contrat ­présidentiel » de redressement. Pourquoi? Parce qu’il est indispensable, vital pour l’avenir de nos enfants, de mettre le ­projecteur sur la ­trajectoire mortifère sur laquelle sont ­engagées nos finances ­publiques et d’en tirer des conclusions. Il est certes tentant de se voiler une ­nouvelle fois la face, ­d’utiliser la crise ­sanitaire comme alibi pour expliquer les déficits ­actuels. Mais le niveau d’endettement ­comparé de la France et de ­l’Allemagne résume une dégradation continue et ­spectaculaire.

En 2007, les deux pays avaient une dette publique identique : 64% du PIB. Aujourd’hui, la dette est de 70% en Allemagne et de 118% en France. Ce décrochage financier nous fait courir des risques immenses : une remise en cause de la solvabilité de la France, un prélèvement sur l’épargne des ménages, une fragilisation de la solidarité intergénérationnelle et de la solidarité tout court.
La Cour des comptes vient de publier un rapport sur « la stratégie de finances publiques d’après-crise » très instructif. Il donne une photo saisissante de l’évolution de nos déséquilibres financiers. Le niveau des dépenses publiques françaises « est l’un des plus élevés du monde ». La part de l’emploi public dans l’emploi total est de 22 % en France au lieu de 10 % en Allemagne. L’augmentation des effectifs dans la fonction publique territoriale a été de 8 % en dix ans. Cette politique est d’autant plus inquiétante qu’elle « ne se traduit pas systématiquement par de meilleures performances économiques ou de bien-être ».

 

La Cour écrit par ailleurs que le système de retraite français doit faire face à « la perspective d’un déficit massif » avec un décalage considérable de l’âge légal de la ­retraite par rapport à nos ­voisins. La France agit comme s’il n’y avait ni vieillissement de la population, ni allongement de la vie, une exception française intenable. La Cour passe ­également en revue l’ensemble de nos ­politiques de protection sociale. Elles s’éloignent toutes de celles pratiquées par les pays voisins. Les dépenses consacrées au logement sont deux fois plus importantes sans pourtant être efficaces. Le déficit de l’Assurance maladie, considérable, ne s’explique que partiellement par la crise sanitaire.

La France reste un pays suradministré

Tirant probablement les leçons des graves défaillances observées ces dernières années dans le fonctionnement de l’État, la Cour écrit par ­ailleurs qu’ »une simplification du ­millefeuille des collectivités ­territoriales, de leurs établissements publics, des services de l’État et des autres opérateurs publics apparaît  nécessaire ». À une époque où la rapidité de décision est un atout décisif, la France reste un pays suradministré. À lire ce rapport, clair et ­pédagogique, on est pris de vertige. La crise pandémique s’est abattue sur un pays affaibli par la ­désindustrialisation mais aussi par une politique au fil de l’eau en matière de dépenses publiques.

La campagne présidentielle peut être l’occasion de donner un coup d’arrêt à un déclin qui semble inexorable. Les candidats pourraient s’engager solennellement devant les Français sur trois actions prioritaires : mettre en application dès l’automne une réforme des retraites assurant l’équilibre financier du système (recul progressif de l’âge légal avec prise en compte de la pénibilité), finaliser au cours de la première année de mandat les réformes permettant d’assurer l’équilibre de tous les régimes de protection sociale, mettre en place dans les deux ans une réforme de l’État simplifiant les circuits de décision. La sortie de crise doit être progressive et non brutale, tout le monde en convient. Notre modèle social doit être préservé. Mais, sur quelques réformes  essentielles pour notre survie, il est capital de donner au prochain président les moyens d’agir de manière rapide et ­déterminée. L’égalité, la solidarité et la ­fraternité, qui brillent aux frontons de nos édifices publics, nécessitent aujourd’hui un effort national et collectif. »


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